En résumé
• Le Maroc a accueilli 8,9 millions de touristes en six mois en 2025, leader africain.• Le tourisme de masse concentre richesses et pressions sur Marrakech, Agadir, Fès.
• Défis majeurs : durabilité environnementale, inégalités économiques, diversification urgente.
Le Maroc, déjà leader incontesté du tourisme en Afrique, poursuit sa montée en puissance, mais à quel prix ? En 2025, le royaume chérifien a accueilli 8,9 millions de visiteurs entre janvier et juin, un chiffre impressionnant qui confirme sa place de leader sur le continent. Pourtant, si ce succès est indéniable, il soulève aussi des questions sur la durabilité de ce modèle de croissance et ses impacts environnementaux. Entre les ambitions affichées et la réalité du terrain, le Maroc parviendra-t-il à maintenir son statut de destination phare à long terme ?
Des chiffres qui ne mentent pas, mais qui cachent une réalité complexe
Le Maroc, avec 8,9 millions de touristes en six mois, affiche des performances exceptionnelles qui font pâlir nombre de ses voisins africains. Ces chiffres sont d’autant plus significatifs lorsqu’on les compare à ceux d’autres destinations phares. Par exemple, l’Afrique du Sud, pourtant bien ancrée sur le marché du tourisme, n’a enregistré que 4,5 millions de visiteurs en 2023. Mais ces statistiques impressionnantes masquent des défis non négligeables. Si le pays attire les foules, la plupart des touristes affluent vers quelques destinations phares comme Marrakech, Agadir, ou Fès. Cette concentration des flux touristiques dans certaines régions entraîne une pression croissante sur les infrastructures locales et un déséquilibre économique entre les zones touristiques et les autres régions du pays.
Un modèle économique fragile ?
Le modèle marocain repose largement sur un tourisme de masse, notamment à travers l’afflux constant de visiteurs européens, mais surtout français, qui représentent plus de 50% des touristes en provenance de l’étranger. Le tourisme constitue d’ailleurs une part importante du PIB marocain, estimée à 7,3% en 2023, mais ce chiffre pourrait cacher des inégalités socio-économiques profondes. Si l’industrie du tourisme génère des millions de dollars chaque année, les retombées économiques ne sont pas forcément réparties de manière équitable. À l’image de Marrakech, où des milliers de travailleurs vivent dans des conditions précaires, loin des profits réalisés par les grands complexes hôteliers et les grandes chaînes internationales.
Le Maroc a bien conscience de cette réalité et tente de redresser la barre avec des projets axés sur l’éco-tourisme et un développement plus durable. Mais l’ambition affichée de diversifier l’offre touristique et d’investir dans des zones rurales pour désengorger les grandes villes touristiques n’est qu’en phase de déploiement. En l’état, la majorité des retombées économiques du tourisme marocain sont encore concentrées sur quelques pôles. Les autorités marocaines ont aussi annoncé des investissements dans des infrastructures modernes, mais ces projets, aussi ambitieux soient-ils, risquent de se heurter à des contraintes environnementales croissantes, liées à la pression exercée sur les écosystèmes locaux.
Un avenir incertain : croissance ou durabilité ?
Le Maroc ambitionne désormais de diversifier son offre en misant sur des niches comme le tourisme d’aventure, le tourisme vert, ou encore le tourisme culturel, en développant des destinations moins fréquentées. Les autorités marocaines espèrent ainsi attirer de nouveaux visiteurs, au-delà des habituels amateurs de médinas et de plages. Mais cette stratégie, bien que louable, soulève des interrogations. La durabilité de ce modèle reste à prouver. La croissance rapide du secteur risque de diluer l’authenticité de certaines expériences, et des zones comme le désert du Sahara, où l’attrait touristique est de plus en plus important, risquent de se voir submergées par des flux touristiques incontrôlés.
Par ailleurs, bien que le Maroc ait investi dans des projets de conservation et des hôtels écologiques, la question de l’impact environnemental des infrastructures de tourisme de masse reste centrale. Le pays est-il prêt à mettre en œuvre un véritable modèle de tourisme durable qui protège ses écosystèmes tout en répondant à une demande de plus en plus forte ?